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EXPERT INVITÉ. Se lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat, c’est exactement comme monter sur un voilier (sans jamais avoir réellement fait de voile) et s’attaquer au tour du monde en eaux inconnues.
En tant qu’entrepreneur, vous êtes le capitaine de votre navire, traçant votre route à travers le vaste océan des affaires. Par moments, vous avez l’impression de n’avoir aucune idée où vous allez: c’est à ce moment qu’un mentor peut avoir un impact significatif sur votre parcours.
Cependant, il n’y a rien de pire que de tomber sur un conseiller qui vous indique le mauvais chemin. Si vous l’empruntez, vous allez être encore plus perdu et perdre un temps précieux qui pourrait faire la différence entre le succès et l’échec.
Depuis maintenant plus de 10 ans, je m’implique en tant qu’entrepreneur en résidence dans différents incubateurs-accélérateurs et comme mentor pour des start-ups. J’ai aussi, depuis près de 20 ans, eu le privilège d’avoir différents mentors, qui continuent de contribuer de manière significative à mon évolution en tant qu’entrepreneur.
En revanche, durant ces 20 années, j’ai aussi parfois eu ce que je pourrais qualifier aujourd’hui de mauvais mentors: ceux qui vous font perdre votre chemin. Trop les écouter m’a coûté très cher, en temps et en argent, et m’a presque amené au bord du gouffre. Malheureusement, je continue d’en voir de nombreux impliqués dans différents incubateurs-accélérateurs, et cela m’inquiète.
J’ai donc décidé de vous partager les trois types de mentors que les fondateurs devraient reconnaître et fuir.
Les 3 types de mentors à éviter
En tant qu’entrepreneur en résidence ou mentor dans plusieurs programmes d’incubateurs-accélérateurs, je rencontre beaucoup d’autres mentors. Certains sont utiles. Mais pour être transparent, la plupart ne le sont pas. Au mieux, ils vous font perdre votre temps. Au pire, ils vous donnent de mauvais conseils qui vous coûteront très cher.
Il est totalement pertinent d’avoir des mentors qui n’ont pas tous la même expérience et des bagages différents. Il est donc usuel d’entendre des opinions qui peuvent différer. Cependant, la diversité d’opinions est bien différente de recevoir des conseils tout simplement faux. Dernièrement, j’ai commencé à mentorer une start-up qui venait de compléter une session dans un incubateur réputé de Montréal, et j’ai eu l’impression de passer la moitié de mon temps avec les fondateurs à devoir leur faire réaliser que les conseils qu’ils ont reçus ne tiennent pas la route, comme leur «idée», qui n’est même pas encore au stade de produit minimum viable et qui ne vaut clairement pas 25 millions de dollars ou plus.
Voici, selon moi, les trois types de mentors que les fondateurs doivent rapidement identifier et éviter:
1. Les cheerleaders
J’en parlais dans mon blogue «Ma fatigue du monde des câlinours»: les incubateurs-accélérateurs semblent excellents pour attirer des foules de meneuses de claque qui applaudissent toutes les choses incroyables que vous avez accomplies, même si, soyons honnêtes, vous n’avez pas encore accompli grand-chose.
Ils sont formidables à côtoyer et nous aimons évidemment tous qu’on caresse notre ego. Toutefois, même s’ils ressemblent à de super supporters, ils n’ont souvent jamais été à votre place et leurs encouragements semblent parfois vides de sens.
Par exemple, plusieurs firmes de consultation (comptabilité, juridique, etc.) ou de capital-risque demandent à leurs nouveaux associés d’être mentors dans des accélérateurs. Cela leur permet d’obtenir de la visibilité et possiblement des contrats à moyen terme avec les entreprises qui vont décoller. Cependant, pour la plupart, n’ayant aucune expérience dans la création d’une start-up, leur rôle se limite souvent à dire à tout le monde à quel point ils sont formidables. Il y a aussi beaucoup de gens qui auraient rêvé d’être entrepreneurs sans jamais franchir le pas et qui se contentent de jouer ce rôle.
SVP, remerciez-les pour leur temps et leurs encouragements, puis passez rapidement à des personnes plus utiles. Même si leurs intentions sont généralement bonnes, ces personnes ne vous feront pas avancer!
2. Les narcissiques
Dans les 20 dernières années, j’ai pu constater à quel point beaucoup de mentors dans les incubateurs-accélérateurs sont là principalement pour se sentir valorisés et se mettre en valeur. Vous pouvez facilement les reconnaître: ce sont généralement ceux qui parlent sans cesse d’eux-mêmes et de toutes les choses incroyables qu’ils ont accomplies. Ne vous détrompez pas, ces gens ont souvent réellement connu beaucoup de succès et ils s’assureront de vous le rappeler constamment.
Leur conseil est généralement de faire exactement ce qu’ils ont fait, sans comprendre en quoi votre situation diffère de la leur. Aucun projet d’entreprise n’est un copier-coller et même si oui, en tant que mentor, nous devons utiliser nos expériences précédentes pour aider les fondateurs, cela ne veut pas dire d’appliquer la même recette sans contexte.
Les narcissiques sont aussi souvent excellents pour captiver l’attention. Ils sont généralement très intéressants et engageants. Mais lorsque vous cherchez quelqu’un pour vous mentorer ou être membre de votre comité consultatif, vous devez être en mesure d’avoir des personnes qui peuvent voir au-delà d’eux-mêmes, sans quoi leurs conseils risquent d’être inutiles ou inapplicables à votre projet.
Pour moi, ils sont encore plus dangereux que les cheerleaders, car nous avons souvent l’impression que leurs conseils valent leur pesant d’or. On réalise alors un peu trop tard qu’on est tombé sur un narcissique qui ne mentore pas pour vous amener plus loin, mais pour lui-même, tout simplement!
3. Les fournisseurs de services
Si vous travaillez dans une entreprise qui propose des services juridiques, de comptabilité et de marketing pour les start-ups, où iriez-vous pour trouver des clients? Partout où se trouvent les start-ups. C’est pourquoi on retrouve autant de fournisseurs de services comme mentors dans les différents incubateurs-accélérateurs. Ceux-ci s’inscrivent pour devenir mentors afin de rechercher de nouveaux clients. Il ne faut pas leur en vouloir: c’est tout à fait logique!
Cela ne veut pas dire que ces mentors ne peuvent pas être incroyablement utiles. Quel fondateur n’a pas besoin de conseils juridiques gratuits?
En contrepartie, un mentor devrait être en mesure de vous conseiller non pas sur une facette très précise de votre entreprise, mais de manière plus générale. J’ai aussi souvent vu que ces mentors fournisseurs de services proposent parfois des solutions qui sont déconnectées de la réalité de la start-up.
Par exemple, dernièrement, j’ai vu un mentor avocat pousser les fondateurs d’une start-up à s’incorporer aux États-Unis et en France, et ce avant même que l’entreprise ait commencé à faire des revenus, ce qui aurait coûté très cher à l’entreprise pour rien. Ou encore, un expert en marketing affirmer que la meilleure solution pour commercialiser était de dépenser 100 000$ en publicité (soit l’équivalent des revenus de la start-up). Mais vous allez voir: ça va décoller!
Pour ma part, je me rappelle que lorsque j’étais à l’École d’Entrepreneurship de Beauce, nous avions à chaque séjour des «experts» qui venaient nous dire à quel point nous devrions embaucher des consultants pour mettre en place un nouveau CRM ou pour tel autre sujet. C’étaient des gens avec des expériences incroyables et je pensais qu’il fallait absolument les écouter. Cela m’a coûté des centaines de milliers de dollars pour réaliser des choses pas du tout nécessaires.
Comment éviter les mauvais conseillers
Réparer les dégâts causés par de mauvais conseils est incroyablement frustrant. Donc, avant de demander conseil à quelqu’un, même s’il prétend être un expert, demandez-vous s’il comprend vraiment les besoins des start-ups en démarrage et votre situation particulière.
Ce n’est pas parce que quelqu’un a réussi ou travaille dans une grande entreprise qu’il a les bons conseils pour vous. C’est vrai que c’est toujours tentant de pouvoir ajouter le nom d’une personne connue dans votre présentation aux investisseurs, mais ça ne sert à rien si cette personne n’est pas la bonne pour vous accompagner.
Ainsi, lorsque vous rencontrez des conseillers potentiels, réfléchissez à ce qu’ils peuvent vous offrir spécifiquement. Comprennent-ils votre entreprise et votre secteur d’activité? Comprennent-ils le monde des start-ups en phase de démarrage, où il faut accomplir un million de choses impossibles avec une petite équipe et sans budget? Vont-ils répondre à votre texto à 23 heures un dimanche soir en cas d’urgence? Sinon, trouvez quelqu’un qui le fera.